Beauté et pillage
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Rien ne peut nous préparer, visiteurs modernes, au choc de la rencontre avec ces sites, ni les photographies aussi réussies soient-elles, ni les documentaires, ni même la visite des musées aussi prestigieux soient-ils, et je pense au musée du Louvre qui à Paris est particulièrement superbe.

Ce ne sont là que de pâles reflets, les fragments épars d'une civilisation ayant eu une vie de plus de trois millénaires et dont la glorieuse réalité dépasse en beauté tout ce que l'on peut imaginer d'elle. Tant que l'on a pas vu soi-même, de ses propres yeux, notre imagination fut-elle débridée, est de toute façon trop étroite. Une seule solution, aller sur place.

Ce n'est pas tant le gigantisme de ces édifices arrachés à l'étouffement des sables du désert, qui frappe les esprits, encore qu'il remette en question de façon radicale notre sens de la perspective.
Non le choc véritable, le visiteur le reçoit au milieu d'une forêt de piliers gigantesques ou bien au détour du couloir tortueux d'une pyramide ou d'un tombeau, lorsqu'il découvre et réalise que chaque parcelle d'espace fut recouverte par des peintures ou des reliefs d'une beauté sidérante, créant une stupéfiante mosaïque d'images venues d'un lointain passé.

Ces images restent à jamais gravée dans la mémoire, stimulant sans cesse l'imagination. N'est-ce pas là, le miracle pour cette civilisation obsédée d'éternité, elle revit, ou plutôt continue à vivre par notre imagination, par delà le temps.

Que de telles merveilles aient pu survivre tient du miracle aussi, tant il est vrai que les trésors des pharaons furent pillés au fils des siècles, d'abord par les paysans, en dépit des gardes, des malédictions et autres menaces, puis par les vagues d'envahisseurs qui dominèrent tour à tour le pays après la chute des pharaons et la montée du christianisme, par le fanatisme des nouvelles religions, chrétienne et musulmane, qui ont maintes fois attenté aux oeuvres, martelant, détruisant, défigurant, des oeuvres magistrales.

Les pires excès furent commis aux 18e et 19e siècles, quand des aventuriers sans scrupules déferlèrent, attirés par le filon inépuisable des antiquités égyptiennes. Pyramides et tombeaux furent éventrés à la dynamite, leur entrailles profanées, leurs trésors volés ...

Plus d'un musée prestigieux (pour ne pas dire tous) ont eu recours à ces profanateurs professionnels, pour fonder leur collections d'antiquités égyptiennes.
Ces vulgaires mercenaires avaient le plus souvent recours à la force brutale des masses et des béliers afin d'accéder à ce qu'ils considéraient comme des babioles : des petites momies d'enfant ou d'animaux, des objets funéraires irremplaçables, des manuscrits uniques et tous les objets du quotidien que des mains pieuses avaient déposés pour qu'ils accompagnent les défun dans l'au-delà.
Des feuilles d'or étaient arrachées des sarcophages, les bandelettes  des

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